Capitale historique de la haute joaillerie, Paris n’avait pas, depuis bien longtemps, présenté une telle créativité. Les collections dévoilées lors de la semaine de la haute couture automne-hiver 2019/20 par les maisons de la Place Vendôme et les grands noms de la joaillerie internationale ont rivalisé de beauté et de virtuosité. Luxe Infinity a sélectionné quelques pièces représentatives de ce niveau d’excellence.
Elles ne défilaient pas sur les podiums parisiens mais ce sont bien des pièces uniques d’exception qui ont été dévoilées en juillet dernier à un public privilégié. Clients et journalistes internationaux se sont croisés dans les salons des maisons de haute joaillerie, les grands hôtels de la Capitale ou quelques lieux prestigieux réservés le temps d’une présentation. Il est difficile d’être exhaustif tant les collections foisonnaient, tant elles étaient riches en couleurs et préciosité. Les grands noms de la place Vendôme n’ont pas manqué à l’appel : Van Cleef & Arpels, Chanel, Cartier, Chaumet, Piaget, Dior, Boucheron, Mellerio ou encore, Louis Vuitton… Mais ces maisons étaient loin d’être les seules présentes. L’Italien Gucci avait aussi choisi Paris pour dévoiler dans un hôtel particulier sa première ligne de haute joaillerie inspirée par l’univers poétique et kaléidoscopique du
créateur Alessandro Michele. Pas moins de 200 pièces pour la collection Hortus Deliciarum, peuplée de créatures magiques et de symboles totémiques romantiques qui expriment la beauté du passé et du présent dans une évocation de l’amour et de la nature. Parmi les bijoux les plus remarqués, un collier de diamants sur or blanc, orné de trois opales en son centre, de saphirs multicolores mais aussi, d’une tourmaline, d’un chrysobéryl et d’un grenat.
Première mondiale
Une autre marque italienne d’accessoires de luxe, Rubeus Milano, a créé l’événement au Musée des Arts Décoratifs avec sa première ligne de haute joaillerie dédiée à une pierre rare, l’alexandrite russe, dont la caractéristique est de changer de couleur en fonction de l’éclairage : du grisvert au fuchsia fluorescent, en passant par le pourpre et le violet. Une collection unique au monde de 37 alexandrites, dont la plus grande pèse 69,37 carats et dépasse le record du Smithonian Museum de Washington. Cette pierre orne la pièce maîtresse de la collection, un collier dessiné par le designer de haute joaillerie Frédéric Mané, en collaboration avec le sculpteur joaillier Jothi-Sèroj Ebroussard, auxquels Viktor et Nataliya Bondarenko, les fondateurs de la maison Rubeus Milano, ont confié la conception de ces pièces d’exception en or blanc, titane noir, cristal de roche sculpté, alexandrites, spinelles gris et couleur Red Man Sin – un rouge flamboyant -, pavage diamants taille brillant et rose-cut. Le collier Impérial imaginé par Frédéric Mané offre un multiporter et peut par conséquent se transformer : collier court ou long, broche courte ou longue, voire pendentif. Les motifs sont également montés en tremblants souples pour mettre en scène la plus grande Alexandrite au monde.
D’autres maisons et créateurs de joaillerie se sont distingués à Paris cet été et il serait impossible d’établir une hiérarchie. Anna Hu, première créatrice asiatique parmi les membres du comité de la haute joaillerie parisienne, a présenté à l’hôtel Ritz sa nouvelle collection Silk Road Music, dédiée à la Route de la soie, mais aussi inspirée par la musique et par la nature, avec notamment une bague Papillon transformable en broche avec en son centre une tourmaline couleur rubellite de 16,30 carats. Ou encore, des boucles d’oreilles Ellington, où les touches d’un piano sont représentées par une alternance de saphirs et de diamants taille baguette, et en pendentif, une perle de conche en guise de note de musique.
La collection Portraits of Nature by De Beers s’est inspirée d’un kaléidoscope de créatures sauvages, de leurs couleurs et de leurs textures éblouissantes – l’iridescence des ailes d’un papillon dans la lumière du soleil, l’éclat scintillant d’un poisson, les transformations du caméléon. La parure Knysna Chameleon présente un ensemble de diamants dont les tons traduisent les couleurs intenses du caméléon mais aussi, la dualité texturale de ses écailles. Sur le collier transformable, deux rangées de diamants colorés détachables, dont des diamants bruts bleu-vert et rose clair, ondulent aux côtés d’une ligne de diamants blancs taille baguette. Un diamant de 2,01 carats, brun jaune Fancy, taille poire, y est suspendu, ainsi qu’un diamant d’1,11 carat, rose brun Fancy, taille radiant.
Le Paris de la Place
Quant aux grands noms de la Place, ils semblaient s’être donné le mot pour se présenter sous leurs plus beaux atours. Les collections des maisons de joaillerie françaises proposées cet été pour l’automne-hiver 2019/20 furent de très haut niveau, sans aucune exception. La maison Chaumet a interprété avec brio les humeurs du ciel et les heures du temps. Depuis toujours, le ciel dans tous ses états inspire les créateurs et Chaumet crée des joyaux inspirés de la voûte céleste depuis le XIXe siècle : diadèmes, bijoux de tête, broches, devants de corsage, colliers, pendants d’oreilles… Par ailleurs, cette maison n’a jamais cessé d’exprimer son lien avec les arts. Cette nouvelle collection décline un thème pictural et poétique, où sa perception de l’immensité et son attachement à la nature sont illustrés au travers de parures de haute joaillerie. Parmi celles-ci, la parure Passages met en lumière deux opales noires d’Australie de 28,11 et 29,40 carats sur le collier ; de 29 carats sur la bague. Le collier articulé est composé de sept branches d’or blanc et rose – où sont sertis des diamants taille brillant – sur lesquelles sont comme parsemées les gemmes de couleur : six opales noires d’Australie, une tourmaline Paraiba ovale du Brésil et 31 tourmalines dites Paraiba multicolores taille fantaisie du Mozambique.
Enfin, dans la collection Riders of the Knights, la nouvelle directrice artistique de Louis Vuitton joaillerie, Francesca Amfitheatrof, a mis en lumière une esthétique immersive, empruntant aux codes médiévaux de la chevalerie et des armoiries. Elle a imaginé une sorte d’armure de lumière pour exprimer le rayonnement intérieur de celle qui porte ces parures. La pièce la plus spectaculaire, parmi une cinquantaine de réalisations qui ont été dévoilées – l’autre moitié sera présentée plus tard -, est sans doute le collier ras de cou Royaume. Une résille en or blanc tissée de 1600 diamants et de saphirs avec au centre, un saphir bleu royal de 19,31 carats. Cette création architecturale reprend les codes de la forteresse médiévale en illustrant herse, chaînes ou encore, pont-levis. Sa forme s’inspire du gorget, pièce d’armure destinée à protéger le cou. Cet emmaillement souple et délicat souligne la majesté du saphir, pierre royale par excellence, qui trône au centre du collier, comme protégé par cette précieuse résille d’or blanc, saphirs et diamants.
Par CARINE LŒILLET
© Photo Boucheron