Le Grand Musée du parfum, installé dans un hôtel particulier de la rue du Faubourg Saint-Honoré qui a abrité la maison Christian Lacroix, propose une expérience sensorielle, revendiquant une « approche différente et complémentaire » de celle du Musée international de la parfumerie à Grasse. Offrande aux dieux puis eau médicinale, instrument de séduction, désormais au coeur d’une industrie très dynamique : le parfum, son histoire et ses ingrédients.
Le kyphi, qui remonte à l’Egypte antique, est l’un des premiers parfums dont la formule a été connue, explique l’historienne Elisabeth de Feydeau, membre du conseil scientifique et culturel du musée. « Ce parfum était préparé par les prêtres pour honorer les dieux. Ils se sont rendu compte que dans sa préparation, ils trouvaient une sorte d’apaisement, et ils ont commencé à le proposer comme médicament ». Le kyphi (qui signifie « parfum deux fois bon »), associe les bois, les épices, les fleurs, pour une senteur très orientale. Ces parfums, dont les recettes se trouvaient sur les murs des laboratoires à l’entrée des pyramides, étaient brûlés, ingérés ou encore mélangés à des huiles pour des massages.
Le parfum lié à la médecine
Une reine septuagénaire laide et paralytique qui retrouve la santé et la beauté de ses 20 ans grâce à un élixir concocté par un ermite: la légende de l’eau de la reine de Hongrie est le meilleur concept marketing jamais inventé, souligne Elisabeth de Feydeau. Cette eau, qui date du 14e siècle, utilise le procédé de la distillation mis au point par les Arabes, avec des plantes de la garrigue comme le thym, la marjolaine, le romarin. Le parfum est alors lié à la médecine, à l’hygiène et à la lutte contre les épidémies qui déciment l’Europe, comme l’illustre l’histoire du vinaigre des quatre voleurs. Les quatre brigands détroussent les cadavres pendant la peste de Toulouse au 17e siècle sans être contaminés, grâce à une recette à base notamment de clous de girofle et d’absinthe agissant comme antiseptique.
L’art du parfum
D’apothicaire, le parfumeur devient créateur à partir de la fin du 18e siècle, où s’ébauche un art du parfum, au 19e et encore plus au 20e siècle. Le parfumeur se libère des formules pour créer, trouvant dans les matières de synthèse des ingrédients qui viennent enrichir sa palette et l’aident à dépasser la nature. La chimie permet par exemple de reproduire l’odeur du muguet, fleur trop fragile pour qu’on puisse en extraire le parfum. La parfumerie se lie à la mode. « Cette robe vous va à ravir, mais une larme de mon parfum sur son ourlet, et elle vous ira à merveille », disait Paul Poiret, premier couturier à commercialiser ses propres parfums en 1911.
La conception du jus
L’appellation de « nez » ne reflète pas tout le processus de création d’un parfum: « Le nez bien sûr est présent, mais ce n’est qu’un outil de vérification », explique Jean-Christophe Hérault, parfumeur chez le géant américain des arômes et parfums IFF, partenaire du musée. Dans son bureau, il commence par imaginer un parfum, écrit une formule, comportant les ingrédients et leurs quantités, puis fait peser par des assistants dans le laboratoire cette recette, qu’il teste et affine peu à peu.
Six heures: c’est la durée idéale d’un parfum, pour Jean-Claude Ellena, ancien nez d’Hermès, maison dont il est désormais conseiller. « Les molécules lourdes, celles qui vont rester longtemps, il y en a trente, c’est tout », explique le célèbre parfumeur, citant « la coumarine, les muscs, la vanille ». « Si on n’utilise que ces molécules, la construction olfactive est très peu intéressante, elle se répète. Avec des molécules plus légères, il y a plus de diversité d’expression ». « On entend souvent, il faut que ça tienne sur ma peau. Moi je dis oui, mais pas des jours! Le beau ne tient pas forcément. »
(Source : AFP-Relaxnews)
Claudie.V